vendredi 27 novembre 2015

Parce que tsé, moi aussi...

On avait choisi de vivre les débuts ensemble, dans une bulle. Savourer ce petit secret qui nous brulait les lèvres et nous gonflait le cœur. On préparait la surprise. On voulait faire quelque chose de gros, ben un peu plus que les autres, histoire que ce petit être ne passe pas inaperçu, vu son 4e rang.

J’étais fatiguée, beaucoup. Ça ne faisait que commencer et je me demandais ce que la suite serait… Mais je me sentais tellement bien! Tellement heureuse de porter la Vie encore une fois!

J’avais mon rendez-vous pour mon écho le mardi. J’allais enfin voir ce petit être qui poussait en moi. Celui qui ajouterait un rayon à notre famille. Les enfants l’attendaient déjà avec impatience!

Le vendredi précédant, le début de la fin. Au début, je ne savais pas quoi en penser. Je ne voulais pas m’inquiéter, je ne voulais pas non plus me fermer les yeux et espérer. Avec l’avis d’un infirmier, j’ai décidé d’attendre à mardi, de ne pas aller consulter tout de suite. Je crois qu’inconsciemment, je ne voulais pas voir. Ne pas voir l’inertie. Ne pas voir l’absence de vie, de petit cœur.

Dimanche matin, la fin. Sans. Aucun. Doute. J’étais en état de choc d’avoir expulsé un début de vie. Ma première pensée a été pour cet enfant : j’espère qu’il n’a pas souffert… L’amour d’une mère, tsé.

Ce n’était pas ma première fois, pas ma première fausse couche. Mais ça a été la plus intense. Quelle tempête! Que dis-je, un vrai tsunami!

19 octobre 2015-11 semaines... à 4 jours de la fin !

J’étais enceinte. Pour vrai. À près de 12 semaines, ce bébé était déjà un membre de notre famille. À près de 12 semaines, j’avais déjà la bedaine, les hormones à l’envers, la fatigue, les projets, les plans, du nouveau linge.

Quand ç’a été fini, oui, j’ai eu un deuil à faire. Le deuil de mon enfant, d’une Vie. Mais au-delà de ça, j’ai fréquenté la mort. Et la mort, c’est triste.

Quand ç’a été fini, c’est comme si j’avais accouché. Mon ventre mou, sans le bébé dans les bras. Le post-partum, même si on ne s’est pas rendus à 12 semaines, a été bien réel! Les hormones qui reviennent à la normale, sans nécessairement prendre le chemin le plus direct.

Accoucher pendant près de 10 jours, c’est dur sur le corps. Ça m’a paru pire que d’accoucher d’un enfant à terme. Même si ma dernière expérience avait été terrible… Même si cet enfant était gros comme un haricot. Même si c’était beaucoup moins douloureux.

Comme si mon corps ne comprenait rien de ce qui était en train de se dérouler. Peut-être que ce n’est pas juste une impression. Peut-être que le corps n’a pas compris, puisque ce n’était pas censé être fini.

Heureusement, tout s’est bien déroulé, dans la mesure où ça peut bien aller.

Je suis quand même allée à mon écho le mardi suivant. Il restait bien les traces de la Vie qui m’a traversé le corps. Mais pas plus que des traces. J’ai fait la paix avec cet événement. J’avais déjà mon idée sur la fausse couche, même si j’étais loin de me douter de tout le cheminement que ça me demanderait. Mon idée est restée la même : ça fait partie de la vie, ce n’est pas moi, « c’est de même, point ». Je comprends quand même mieux...

Mon deuil est fait. J’imagine mon p’tit bout de vie avec ma tante sur le bord de son lac. Ça me fait du bien d’y penser ainsi. Ça me fait du bien d’en parler, de dire qu’il a bel et bien existé.

Je croyais vraiment être passée à autre chose. Jusqu’à ce que je commence à voir des annonces de bébé pour le printemps. Et des annonces de quatrième bébé. 

Parce que tsé, moi aussi….



mardi 20 octobre 2015

La limite des mots

source: www.divinatix.com

On dit souvent que les mots sont puissants.

J’y crois. Je crois aussi que les mots sont souvent source de malentendu, de mésentente, de conflit. Un mot mal choisi peut avoir une grande incidence sur la suite d’une situation. Et que dire des mots non-dits ? De ces silences qui alourdissent les mots ?

Il n’y a pas si longtemps, j’ai bien senti que les mots avaient une limite. Aussi puissants soient-ils, comment peuvent-ils prétendre être plus forts que la tragédie ? Être plus grands que l’intensité de la douleur, de l’inquiétude, bref, que l’émotion ?

Il n’y a pas si longtemps, j’ai cherché des mots. J’ai réalisé que j’ignorais ce que je cherchais. Des mots de réconfort ? Des mots de soutien ? Des mots d’amitié ? Des mots assez puissants pour faire pâlir la douleur de ces personnes. Je n’ai rien trouvé. Peut-être qu’avec le temps j’ai constaté que la peine doit se vivre, aussi douloureuse soit-elle, pour pouvoir s’atténuer avec le temps. Peut-être qu’avec le temps j’ai compris que la tête connait les mots, mais que le cœur a besoin de plus de temps pour les intégrer, pour les comprendre, pour les sentir. Et que peu importe qui dira les mots ou quels seront ces mots, le cœur n’en aura rien à foutre.

Alors on dirait que ça m’a coupé l’inspiration.

Je crois qu’il y a des situations où un regard, une main sur l’épaule, une accolade c’est encore plus puissant que les mots. Et je crois aussi que certaines personnes sont simplement moins réceptives aux mots ou à toute forme de réconfort. Il faut leur laisser le temps. Laisser le temps à leur cœur de se dégonfler un peu pour pouvoir accepter un peu d’amour.

Je vais continuer de croire que les mots sont puissants. Même les plus simples et les maladroits. Même les moins poétiques et les timides. L’intention qui les propulse est probablement ce qui leur donne leur force…   

mercredi 14 octobre 2015

Je suis l'enfant de quelqu'un

                                                 


Vous savez toutes ces belles choses que l'on dit de nos enfants ? Les belles phrases, les belles images. Celles que l'on voit circuler sur Facebook qui nous font dire "aaawww" "c'est tellement vrai" et qui nous ramollissent le coeur un peu. Celles que l'on s'empresse de partager pour montrer à tout le monde à quel point on veut exploser d'amour pour ces petites vies que l'on a créé.

Il y a eu les vergetures marques de tigresse. Il y a eu "je ne suis pas parfaite, mais j'ai créer la perfection : mes enfants". Il y a eu toutes une liste de petits travers d'enfants qu'on trouve ben cute. Puis toutes une liste de choses merveilleuses que nos enfants font ou disent.

Bref, on ne cesse de dire à quel point nos enfants sont géniaux, merveilleux, qu'on les aime peu importe leurs défauts, leurs travers, leurs qualités, leurs habitudes....

Ben un jour, j'ai réalisé que j'étais l'enfant de quelqu'un. La merveille de quelqu'un.

Que quelqu'un aurait pu lire (mes parents pis Facebook... hum) ces mêmes mots en pensant à moi, à mes frères.

Que si moi, je veux le meilleur pour mes petits soleils, il y a aussi quelqu'un qui veut le meilleur pour moi. Que si je m'inquiète pour l'un d'eux, il y a probablement quelqu'un qui s'inquiète pour moi.

Que si mes enfants sont la plus belle chose de l'univers pour moi, je suis, moi aussi, la plus belle chose au monde pour quelqu'un.

À y penser quand on s'attendrit devant une image ou une phrase de maman.
Mais aussi quand on a l'estime dans les bottines. "Et si c'était mon enfant qui pensait ça de lui ?"
Et un peu aussi quand on a envie de critiquer nos parents "Et si, comme moi avec mes enfants, mes parents faisaient de leur mieux ?"

vendredi 25 septembre 2015

Le grand amour de Mademoiselle C.


Dans quelques semaines, ça va faire un an qu’on a coupé la suce de Mademoiselle C. Ça fera un an qu’on se bat contre la plus grande histoire d’amour de tous les temps.

Ma fille avait six suces. Pas qu’on soit compulsifs, simplement que quand on croyait avoir perdu celles qu’on avait, on en rachetait. Juste avant de le retrouver. Et plutôt que de les jeter ou de les ranger, je lui ai laissé dans son lit. J’espérais que la nuit, elle les trouve et se débrouille sans avoir besoin de nous réveiller. Ça ne coute rien de rêver !

L’Halloween. C’était LA date. Celle qui marquerait la fin. Ça a été le début de la guerre. Mademoiselle C. a donné sa suce (j’avais coupé les autres une à une, pour que le choc soit moins grand) à son cousin. Elle a demandé sa suce la moitié de la première nuit. Si on peut dire qu’elle l’a demandé. J’étais contente, je pensais que c’était déjà gagné.  Ah-Ah.

Oh, elle n’a pas redemandé sa suce. Elle était pleinement consciente de l’avoir donné à son cousin et que c’était fini.

S’endormir est devenu interminable. Se rendormir la nuit, presque impossible. On croyait que c’était seulement les premiers jours, qu’elle s’adapterait. On le croit encore. Mais on pense en années maintenant.

Elle a commencé à prendre la suce de sa petite sœur. D’abord lorsqu’elle l’a trouvait par terre ou sur un meuble, bref, lorsqu’elle était inutilisée. Puis, c’était directement dans la bouche de sa sœur. Les réprimandes, les conséquences, les réconforts, les tentatives de remplacement, rien ne l’a dissuadé. Encore aujourd’hui, j’ai dû l’avertir et j’ai eu droit à une crise quand je l’ai repris de force.

On est à la fin septembre. Ça va faire un an à l’Halloween. On croit encore qu’elle va réussir à faire son deuil. On est convaincu d’avoir fait la bonne chose en lui enlevant l’an dernier. On trouvait qu’elle commençait à avoir une relation malsaine avec le caoutchouc. Le besoin était trop grand, trop souvent. Elle respirait mal, la nuit, la bouche pleine. Elle semblait se réveiller juste pour son grand amour, pour s’assurer de l’avoir près d’elle.

On envisage de couper la suce de la petite, qui aura 17 mois dans quelques jours. Tant qu’à se battre avec une, pourquoi ne pas mener toutes les guerres en même temps ?





mercredi 16 septembre 2015

Prière à Saint-Joseph

source: le soleil de Floride


Salut Saint Joseph !

Parait que c’est toi le saint qui vend des maisons. Parait que si on t’installe la tête en bas devant la maison, on va réussir à vendre vite vite vite. Parait que tu travailles bien.

Ouain.

Je t’imagine, assis sur ton nuage, avec de la broue dans le toupet. Parce que des maisons à vendre, on ne se le cachera pas, il y en a des tonnes et des tonnes en ce moment ! Et tu dois avoir du mal à trouver un acheteur pour chacune.

Mais quand même !

Il y a 8 mois, nous avons mis notre maison à vendre. Dans le bon temps. Les années précédents, c’était à ce moment de l’année que les maisons autour s’étaient vendues. On a fait nos devoirs : on a regarder les prix, on a comparé les maisons. Surtout, on a fait un travail colossal de ménage et d’épuration. Parce qu’une famille de cinq, ça n’a pas juste besoin de cinq assiettes pis d’un divan.

On a fait du bon boulot. Me semble.

Notre objectif, c’était de déménager avant que l’ainé entre à l’école (c’était à la fin août !). Ça fait que dès que nous avons trouvé la maison qu’il nous fallait, nous avons foncé. Son état, son prix de départ, nos recherches et négociations nous ont permis de nous entendre avec la vendeuse à un prix  fort intéressant, un montant qui nous permettrait d’acheter avant de vendre la nôtre.

On était certains de vendre rapidement.

On s’est dit : on va pouvoir la rénover avant de déménager, évitant ainsi de « vivre » dans les rénos.  On a commencé à déménager l’essentiel au début juin, pour se sauver de la folie du 1er juillet. Nos rénos n’étaient pas tout à fait terminé, on n’avait pas de douche encore, juste un bain. On s’est dit : au pire, on ira prendre une douche à l’autre maison si ça nous manque trop.

On ne l’a jamais fait.

On a pris notre temps en juin pour finaliser le déménagement et ensuite faire un gros ménage. On a refait une visite libre, la maison vraiment libre. On a ajouté une douche à notre nouvelle maison. On a tricoté serré pour arriver financièrement, parce que nous, on pensait vendre vite et on n’avait pas gardé assez de sous pour palier aux petites surprises survenues durant l’été. On s’est dit, avec la rentrée, ça va se placer, on va être correct.

Sauf que non.

Faut encore garder des sous parce que la maison, on l’a encore en notre possession. On doit prévoir à long terme, parce que la maison n’a pas encore trouvé son acheteur. Pendant ce temps, on entretient une maison vide. Une sapré belle maison ! Mais qui a un peu de mal à rivaliser avec les maisons neuves en haut de la côte et les maisons de son âge avec un peu moins d’attribut.

Donc, si jamais tu trouvais ton deuxième souffle, si jamais tu avais un petit regain, une petite lueur (ou même de la pitié, on prendrait n’importe quoi) j’apprécierais Saint-Joseph que tu milites en notre faveur. Que tu nous envois notre acheteur et qu’on s’entende bien et rapidement. Que cette maison qui a fait notre bonheur revive à nouveau sous de nouvelles couleurs. Qu’elle soit parfaite pour quelqu’un d’autre, qu’elle voie s’épanouir un autre amour.

Pour que nous, on puisse recommencer à vivre aussi.

Pis peut-être que si ça arrive, si on vend, je vais avoir le goût de t’allumer un lampion pour te remercier.


Ah pis au cas où tu ne l’aurais pas encore vue, voici NOTRE ANNONCE



 PS  Après ça, t'ira voir mes cousins, mes voisins pis mes amis. Eux autres aussi essaient de vendre !





vendredi 21 août 2015

Au revoir, ma tante

La semaine dernière, tu es partie. Tu as changé de monde. La semaine dernière, c’est toute une épopée qui s’est terminée. La vie continue, oui. Différemment. Ton départ est un soulagement à toute ta douleur, ta souffrance de plus en plus grande dans ton corps de plus en plus petit. Malgré tout, ça fait mal. De se rendre compte que la vie, hier si jeune, est rendue là. De savoir que tu ne seras plus là, ni pour me sourire, ni pour me saluer, ni pour trouver mes enfants beaux.

Pendant que les cowboys chantaient, toi, tu es partie.

Probablement avec ton Pepsi, ta cigarette. Et ta créativité sans limite.

La semaine dernière, tu es partie rejoindre ta mère, ton frère et ton fils. Ce soir, je pense à ceux qui restent. Tes trois gars, le plus jeune n’est pas tant plus vieux que moi... Tes sœurs et tes frères, ma mère de qui tu étais tellement proche... Ton père, on ne lui a pas dit. Tu seras là pour l’accueillir et lui annoncer toi-même… Ou peut-être es-tu déjà allée le voir, pour lui souffler à l'oreille que tout va bien maintenant ? 

Tu es venue dans mes rêves. Deux fois. Je sais que tu étais prête malgré tout et surtout, que tu es bien maintenant; les pieds dans ton lac, ton doux sourire accroché à tes lèvres, le vent dans les cheveux.  

La semaine dernière, tu es partie. Demain, je vais aller te voir, une dernière fois. Demain, je vais dire au revoir à ton corps. Parce que toi, tu es partout autour de moi, maintenant.




"Tu n’es plus là où tu étais, mais tu es partout là où je suis." –Victor Hugo